En 1973 Alfred Aebersold remportait le concours organisé par le Service d’approvisionnement
en eau de la ville de Zurich afin de concevoir une fontaine. Celle-ci allait
être la partie visible d’un vaste système sécurisé et indépendant comprenant à
ce jour plus de 80 fontaines identiques distribuées sur le territoire de la
ville. Le contexte était celui de la guerre froide. La menace, invisible mais
permanente, était celle d’une contamination du réseau public d’approvisionnement
d’eau par un agent extérieur. Le travail d’Aebersold, formé à l’architecture d’intérieur
et ayant fondé en 1961 avec Jörg Hamburger et Herbert Merz le studio Gruppe 3,
était représentatif d’un design suisse prolongeant le langage de Max Bill.
Conçue dans les années 1970 mais rappelant par son vocabulaire formelle un
langage sculptural moderniste, stable, rassurant, par l’organicité et la
solidité des formes, cette fontaine se présente comme un paradoxe historique.
Mais elle se présente également comme un symptôme visuel, inscrit à même l’espace
public, d’une nécessité de défense continue. Le contexte change mais la menace
persiste. Et la fontaine, masquant dans la fonctionnalité de ses entrailles sa
raison d’être – selon un modus operandi duchampien,
masquant et différant le sens que l’on pourrait assigner aux formes –,
fait perpétuellement jaillir la pureté de son liquide.
Photographies et mise en page de Sophie Nys
Texte de Leila Peacock
Paru en 2017
Édition anglaise
17 x 24 cm
184 pages
ISBN : 978-2-93066-716-4
EAN : 9782930667164